De nos jours, beaucoup de jeunes africains, notamment guinéens, ont été séduits par l’envie de migrer, à la recherche d’une vie meilleure. La plupart des migrants-type ne sont ni illettrés, ni des personnes démunies ou au chômage.
Parfois, pendant de longs mois, des jeunes Africains, hommes et femmes, risquent tout, y compris leur vie, pour entreprendre un périlleux périple qui les fait traverser des dizaines de frontières terrestres et les dangereux courants de la mer Méditerranée à la recherche d’une vie meilleure en Occident. Certains y laissent leur vie, d’autres sont renvoyés chez eux et d’autres encore, qui atteignent leur destination, comprennent que leur existence dans leurs pays d’accueil ne sera pas forcément plus facile. Mais étant donné le manque d’opportunités et les sombres perspectives auxquels ils sont confrontés dans leurs pays, de nombreux Africains préfèrent encore migrer, souvent à travers la voie irrégulière.
Ces jeunes dont l’âge varie sont généralement des hommes,des enfants et des femmes. Généralement, ces jeunes abandonnent leurs études, scolaires – soit en cours de lycée ou à l’obtention du baccalauréat, ou universitaires en cours de cycle. Parfois, certains ont obtenu leurs diplômes d’études.
Ils avancent plusieurs raisons pour justifier leur décision de partir. Ils mentionnent des motivations souvent d’ordre économique, étroitement liées à la réalisation de soi et au sentiment que le seul moyen de concrétiser leurs aspirations serait de quitter l’Afrique, du fait que :
- La qualité des services dont elles peuvent bénéficier dans leur pays ne sont pas suffisantes ou n’ont pratiquement pas d’accès aux besoins fondamentaux ;
- Les jeunes trouvant peu de débouchés qui leur permettent de réaliser leurs aspirations et leurs rêves ou d’accélérer leurs perspectives d’avancement et celles de leurs familles ;
- Le taux de chômage élevé et la non-création de l’emploi pour pouvoir les occuper ;
- La mauvaise gestion des politiques de développement, des programmes jeunes, inscrits dans les PNDES et le non-accompagnement de ces jeunes dans la mise en œuvre de leurs idées de projets ;
- Les différentes crises politiques qui gangrènent les États africains à travers la non-alternance des dirigeants.
Il en ressort que la recherche d’un emploi n’est pas la seule motivation de ce voyage et que tous les migrants en situation irrégulière ne sont pas « pauvres » en Afrique et n’ont pas un faible niveau d’instruction.
Conséquences en matière de perte en vie humaine et financière
La migration irrégulière entraîne des conséquences énormes en matière de perte en vie humaine et financière. La dure traversée du Sahara et de la Méditerranée engendrent beaucoup de décès, à travers l’enfer dans le désert et les naufrages de bateaux en mer. Le trafic de personnes entre différents groupes organisés des pays d’origine aux pays de destination en passant par les pays de transit représente un grand danger pour les candidats à l’immigration irrégulière.
En traversant le désert pour rallier l’Algérie, des jeunes – hommes et femmes – et des enfants subsahariens périssent avant d’atteindre leur objectif. Ils tombent et meurent sous l’effet de la chaleur, du manque d’eau et de nourriture. Un univers où chacun s’occupe de sa vie. Personne ne peut sauver son ami !
Les passeurs arnaquent les candidats à la migration de leur argent, les enferment puis les revendent à d’auteurs passeurs dans d’autres villes qu’ils cherchent à rallier. Toutes ces conséquences se répercutent sur les familles qui en paient toujours les frais, car si l’argent demandé par les passeurs qui les retiennent en otage n’est pas payé, ils risquent d’y laisser leur vie. Pour éviter cela, beaucoup de familles s’endettent afin de pouvoir sauver la vie de leurs enfants. Il faut noter que les conditions de ces passages par voie terrestre ne sont pas les plus dramatiques. La traversée du Sahara par les migrants en provenance d’Afrique noire tout comme celle de la mer Méditerranée représente une épreuve terrible.
Après cette traversée de désert qui fait des dégâts, suit donc la traversée de la Méditerranée où la vie de nombreux migrants s’arrêtent. Les passeurs les mettent dans des embarcations à risque, car souvent ce sont des dizaines voire des centaines de migrants qui sont embarqués sur des bateaux pneumatiques alors qu’ils ont été obligés de payer des milliers de dollars américains pour s’y offrir une place.
Ces jeunes gens sont embarqués comme des sardines entachées les unes sur les autres et prennent une destination inconnue dans l’espoir qu’un grand bateau puisse les récupérer en haute mer après des heures voire des jours de calvaire en pleine mer sans issue. La fragilité des embarcations utilisées, la dangerosité de la haute mer et la cruauté des passeurs qui n’hésitent pas à jeter leurs passagers par-dessus bord à l’approche des forces de l’ordre de la patrouille en mer ne sont que quelques-uns des dangers que constitue ce périple.
Conséquences en matière de politiques et programmes de développement
À cause de l’émigration, l’Afrique est en train de perdre un nombre substantiel de ses bras valides et ses cerveaux. Cette fuite des cerveaux et de main d’œuvre qualifiés ainsi que des hommes capables de faire des travaux ou innovations extraordinaires dans leurs pays, entraînent souvent une perte, un recul ou peuvent gêner le processus de développement d’un terroir ou d’une localité. Car ce sont les actifs les plus entreprenants qui tentent souvent l’aventure et une bonne partie de ces jeunes, périssent pendant leur traversée. C’est souvent l’origine du dépeuplement de certaines localités de leur population active jeune, entraînant des conséquences économiques et sociales désastreuses.
Rester et y réussir
Au vu de toutes ces conséquences, liées à la migration irrégulière, il faut dire que cette voie n’est pas la solution pour surmonter les défis auxquels les jeunes africains sont confrontés de nos jours. Car elle met en danger leur vie.
Le défi ou l’enjeu principal est de pouvoir faire voir aux jeunes du continent les opportunités saisissables sur place afin d’atteindre leurs objectifs, de réussir et de satisfaire pleinement leurs besoins ainsi que ceux de leurs familles.
En dépit du manque de sérieux et de vision à long terme pour la plupart des administrations publiques de nos pays, plusieurs structures de jeunes et/ou des institutions privées sont en mesure de financer des projets bien ficelés et défendables.
Pour mettre leurs compétences en valeur, les jeunes africains doivent croire en eux-mêmes et se faire confiance en se mettant par exemple en groupes et créer des richesses en Afrique. Ils peuvent monter des projets et les soumettre aux partenaires d’aide au développement ou de rechercher des financements auprès de leurs familles elles-mêmes. Il faut aussi encourager le co-développement (co-working) pour permettre aux aspirants entrepreneurs de bénéficier des conditions de vie et de travail décentes dans nos propres pays.
L’Etat n’est pas le plus grand employeur mais il a un grand rôle à jouer : mettre les mécanismes nécessaires en place afin de faciliter des investissements et accompagner les initiatives portées par les jeunes.
En voulant sortir de la précarité, il ne faut jamais dire que les emplois sont rares ou que les salaires sont trop faibles. Car souvent ce sont ces types d’arguments qui amènent les jeunes africains à se lancer dans l’aventure vers un monde incertain. Il est donc possible, en temps de paix, d’éviter l’émigration irrégulière, en créant suffisamment d’emplois sur place.
Selon Mouhamadou Kane, contributeur de Peaceinsight.org, « le phénomène de l’immigration clandestine est l’une des principales sources d’insécurité au Sénégal. Durant la dernière décennie, il a tué plus de personnes que le terrorisme ».
DABO IBRAHIMA